Des livres, elle en avait lu toute sa vie. Ils reposaient, plus ou moins rangés sur une grande étagère dans la pièce principale de la maison, vestiges de leur gloire passée.
Des petits, des grands, des à la couverture déchirée par des mains enfantines, des en anglais, des usés avant l’âge.
Des petits, des grands, des à la couverture déchirée par des mains enfantines, des en anglais, des usés avant l’âge.
Toutes leurs histoires, pour beaucoup hors du morne monde actuel avaient constitué pendant longtemps l’unique univers de la jeune femme. Elle les transportait de pièce en pièce, de ville en ville, en oubliant un çà et là, en digne semeuse de rêves. Elle vivait en sautant d’un monde à l’autre, méprisant la vie du dehors de sa chambre, dédaignant les rapports humains, si égoïstes et décevants.
Quand il avait fallu acheter une bibliothèque pour tous les ranger, l’angoisse s’était emparée d’elle. Une angoisse inexplicable, tenace qui lui serrait la gorge comme un étau. Dans quel ordre? Et qu’adviendrait-il de ceux qui étaient derrière, seraient-ils oubliés? L’idée de ces livres coincés dans l’ombre et la poussière lui était intolérable.
Alors, elle les avait laissé s’entasser çà et là. Un petit tas dans la salle à manger, un autre dans la cuisine. Jusqu’à ce qu’il devienne impossible de se frayer un passage d’une pièce à l’autre.
Désespérée, elle s’était résolue à les empiler en grand désordre sur le meuble qu’elle avait assemblé tant bien que mal, en jurant ponctuellement parce que le marteau lui écrasait un doigt.
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